Mon île chérie, mes racines, mes couleurs, mes ancêtres et mon avenir

11 novembre 2006

Un écrivain est né


Humanité, humour, sensibilité, violence, aphorismes, acuité du regard, tels sont certains des "outils" dont s'est servi l'auteur pour ce premier roman. On y décèle très vite un style, un ton très personnel, accrocheur, direct, percutant, fin. Une certaine actualité, très présente dans nos médias, colle parfaitement au sujet abordé, et c'est volontaire. L'auteur va nous faire rencontrer des personnages d'une humanité tangible, simples et vrais, comme la réalité qu'ils vivent tous les jours. Ce qui les rend particulièrement attachants. Fin observateur de notre société, de ses défauts et de ses beautés, l'auteur - Stéphane MARIESTE - mérite d'être découvert et pour ma part je ne peux que souhaiter le lire à nouveau car il a sans nul doute encore beaucoup à nous dire ! Bonne lecture !

http://www.critlib.com/i.php/vinterview/79
http://www.stephane-marieste.com/page3/page3.htmlhttp://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/13007
http://vosecrits.forumculture.net/index.forum
http://www.amazon.fr/Babylone-sous-bombes-Stéphane-Mariesté/dp/2910753492/ref=sr_11_1/171-1216286-1686601?ie=UTF8

22 septembre 2006

Fleur

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Fait bon aujourd’hui. Au moins 27-28° à vue de pistil. Et juste humide comme il faut, avec des petits alizés légers. J’aime.
Le jardin est sympa, je suis contente d’être née ici. J’ai plein de copains-copines : bougainvilliers, roses de porcelaine, orchidées, héliconias, sans parler des fleurs du bananier et du frangipanier.
Ca sent bon et c’est calme.
On a même une vue imprenable sur la Soufrière. Toujours la tête dans les nuages celui-là.
Tiens, c’est Maya qui arrive, ou bien sa cousine, je sais jamais, je ne les reconnais jamais, elle se ressemblent toutes ces butineuses. Enfin, j’aime bien quand elles viennent me chatouiller tout au fond, ça me fait des choses. Et après je me sens soulagée, c’est fou. Il paraît même qu’elles vont préparer des desserts avec tout ce qu’elles récoltent.
Et aujourd’hui j’ai ce qui leur faut, je me sens toute gonflée. Ca me fera du bien un petit régime.
Ben oui, quoi, on a beau être un hibiscus royal, il faut savoir se tenir. Et la prestance ça se cultive.
L’autre jour j’écoutais une conversation entre la patronne et une de ses copines. Elles parlaient juste devant moi. Les deux femmes semblaient hésiter et parlaient de décoration pour le carnaval. Oui, on est en plein là. Et tout le monde cueille à tour de bras. Eh bien j’ai l’impression que ce jour là j’ai échappé à un truc terrible. Ca doit être de ça qu’on m’avait parlé toute petite, quand je rechignais à faire mes devoirs. Maman me disait souvent : « si tu continues tu finiras dans un vase ou sur un char derrière Vaval. Comme ton cousin ».
Finalement elle ont tourné le dos. Ouf !
Des fois je me demande si c’est pas mieux d’être un caillou au milieu du désert. Au moins il n’y a personne pour être tenté de s’emparer de toi. Le seul danger c’est un nomade qui aurait une gastro. Alors là, resterait plus qu’à prier pour qu’il ait des hémorroïdes…
Allez, tout compte fait je crois que je suis mieux en hibiscus flamboyant.
Quoique… j’aurais parlé trop vite ? La voilà qui vient vers moi, la patronne. Qu’est-ce qu’elle tient derrière son dos ??
« Clic »
Eh ?! J’ai rien senti ! Elle m’a sectionné la tige et j’ai rien senti du tout !! Elle est bien bonne. Bon, ça va, enlève ton sale nez de là quoi ! Elle me fourre son pif dans la corolle cette mémère ! Elle est ravagée, c’est dégoûtant !
Elle va dans le séjour et me plante dans un soliflore en cristal plein d’eau froide. Ouch, c’est gelé !
Eh, dis, je vais rester longtemps comme ça maintenant ?
J’ai l’impression que le destin a frappé. En pleine force de l’âge, ma vie va s’éteindre tout doucement, là, sur la table du salon. Pour le plaisir d’humains sans cœur. Comme si on n’était pas mieux dans la nature. Quelle tristesse. A tout prendre j’aurais préféré finir en beauté sur un char de carnaval ou au cou d’une danseuse de zouk, m’enivrer de musique, d’odeurs, de danses et de fumées.
Tandis que là…
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Miss Antilles

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Dis, Maïna, t’as vu la grognasse là bas ? Oui, la Miss Cuba. Cu-ba ! Hihihi ! Tu parles, c’est plutôt le haut qui cartonne ! Au moins du 130 E ! Tu crois qu’ils aiment les gros nénés les jurés, dis ? Alors j’ai aucune chance moi. Et la Miss Dominique… Pas possible comme elle est cambrée. T’as l’impression qu’elle est poussée dans les reins par un vent force 10 ! Enfin, moi je trouve qu’il y en a pas une pour rattraper l’autre. On a toutes nos chances nous deux, non ? Oui, tu as raison. Va falloir séduire ces dix gros porcs vicieux là. C’est ça qui compte. Regarde-les, non mais regarde-les ! Ils suent à grande eau alors qu’il fait que 32°. Tu crois que c’est parce qu’on leur fait de l’effet ? Ah ! Faut démarrer. Une toutes les 20 secondes. Tu y vas d’abord ? Okay. Attention à la planche qui dépasse un peu, tu te souviens ? Faudrait pas trébucher ! Allez ma chérie ! Va ! Bonne chance !
Qu’est-ce qu’elle est belle ma cousine de la Désirade. Un peu moins foncée que moi, mais bon, tous les ans ça change : l’an dernier ils ont élu une délavée, on aurait dit une métro ! Pourtant c’était une Jamaïcaine. Cette année elles sont toutes tip-top question couleurs. La Haïtienne est belle aussi. Dommage qu’elle ait encore son eczéma… Et celle d’Antigua ! Spéciale celle-là. Elle aurait pu choisir un string un peu plus seyant. Ah ! Ils applaudissent Maïna ! Je suis contente pour elle.
Ca y est ma chérie ? Tu as bien marché, tu étais magnifique, si si, vraiment. Regarde la Miss Barbade, elle aurait pu se faire faire le maillot par un pro, franchement ! Et la Saint-Martin ! Oooh le culot ! elle fait des clins d’œil au Président ! La saaaaaaaaaalope ! Comment ? La Miss Iles Vierges ? Ben je crois pas non. Y a longtemps qu’elle l’a perdue sa fleur, crois-moi. A mon avis elle a même dû tricher sur l’âge… Et la Haïtienne… ferait mieux de retourner faire ses ménages ! T’as vu la Montserrat ? Non, pas Caballé ! La brunette là, la planche à pain. Elle va ramasser des miettes celle-là… Tiens ! La Martiniquaise qui déboule. Comme une boule. Tu la pousses elle roule, sûr. Comment tu crois qu’elle a pu arriver jusqu’ici celle-là ? Ca me rappelle une blague : « tu viens d’où ? Je suis Martiniquaise. Et ton père ? Il est parti niq… ». Bon, je suis bête ! Arrête de rire, ils vont t’entendre ! Ca va être à moi ? Ouyouille, j’y vais, à tout de suite !
Attention à cette satanée planche. Vouaaaalà… Messieurs, je vous emmerde. Voui. Vous m’entendez pas, mais je vous le dis. Je le pense bien fort. Jamais vous aurez une fille comme nous dans vos lits, jamais ! Vous vous croyez les maîtres là, vous jouez aux petits dieux qui décident du sort des ces pauvres esclaves en strings. Vous imaginez que vous nous dominez ? Ben non ! C’est juste le contraire ! On vous tient, et pas par la barbichette ! Tant que vous aurez le moindre espoir on vous maîtrisera. Mais vous êtes bien trop bêtes pour vous en rendre compte. Allez, j’y vais. J’ai bien d’autres choses à faire moi.
Alors Maïna ? J’étais bien ? Je me suis défoulée là. Ca va mieux !
Déjà les résultats ? Voyons : tu vois, tout faux ! C’est Miss Gros Nénés qui gagne et sa dauphine c’est Miss Planche à pain ! Ils se sont pas mouillés cette année, c’est équilibré ! Allez viens, on va se descendre un ti-punch enflammé, on l’a bien mérité.
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Le bagne

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Mille ! MILLE ! MILLE ! 1000, ce nombre l’obsédait. Serait-il par hasard le numéro 1000 ? Le millième homme à sortir de là à l’horizontale ? Celui qui, après 28 ans de bagne aurait, comme punition suprême, à subir l’épreuve de la tête sur le billot ?
Joseph serrait cette pauvre tête entre ses mains crispées, les paupières fermées, assis à même le sol de sa cellule humide au plafond grillagé ouvert sur le ciel.
Enfermé là à 19 ans, après 28 années passées à trimer sous les coups de fouets des gardiens, à suer sous une chaleur suffocante de jour comme de nuit, à grignoter des denrées infâmes et ingurgiter des soupes moisies, l’Administration Pénitentiaire ne venait-elle pas de l’informer le matin même que sa peine était exécutoire ? Plus aucun recours, pas de commutation en enfermement à vie, pas le moindre signe de clémence. C’était fichu.
Le papier qu’on lui avait remis ce matin était à ses pieds. Il l’avait lu dix fois, vingt fois, il ne rêvait pas : l’exécution était prévue pour le lendemain matin à 6 heures.
Il finit par se lever en s’accrochant à la tuyauterie au mur et appela un gardien d’une voix affaiblie par la fatigue et l’émotion.
Un bruit de clé, la porte qui s’ouvre avec un grincement sinistre, un colosse dans l’encadrement. Le « porte-clés » arabe (1) :
- Qu’est-ce que tu veux Joseph ?
- J’ai soif Hassan. Et puis je voudrais faire un tour de cour, une dernière fois.
Bon prince, le surveillant prit la main que lui tendait Joseph, le souleva comme une plume, décrocha une gourde de sa ceinture et la lui tendit.
Il faisait beau, comme toujours pendant ces 6 mois de saison sèche, mais le taux d’humidité persistait jour et nuit, entretenant les rhumatismes, favorisant l’éclosion perpétuelle de moustiques avides, rendant tout effort plus pénible chaque jour.
Joseph - atteint de cécité 2 ans auparavant à cause d’un ver parasite très courant dans les eaux croupies – parvint à déboucher le flacon et but de longues gorgées bienfaisantes. Les 55° du rhum blanc de Saint Laurent ne le firent pas tiquer, au contraire : il en ressentit un grand bien-être et remercia Hassan d’un sourire. Chaque prisonnier recevait chaque jour un litre d’alcool. C’était la ration. La seule façon de tenir sous le soleil implacable lorsque lui et ses compagnons d’infortune cassaient des cailloux pour entretenir les pistes de latérite, lorsque dans les marécages jusqu’à la ceinture, attaqués par les sangsues, il devait curer les bouches d’égouts de la ville qui dégueulaient dans le Maroni.
Aujourd’hui il était dispensé de corvées. Exceptionnellement…
Hassan lui tenait le coude et avançait avec lui pas à pas le long d’une sorte de quai qui faisait tout le tour de cette cour rectangulaire bordées de cellules individuelles sur trois côtés. Une extrémité des bâtiments comportait une forte grille permettant les entrées et sorties vers l’Administration. A l’autre extrémité, 200 mètres plus loin, là bas, au bout de cette grande cour d’herbe brûlée, trônait l’engin.
Joseph ne le voyait pas. La guillotine avait été apportée là durant la nuit et assemblée sans bruit.
Joseph ne la voyait pas, mais il savait. On lui avait dit, tout le monde savait. Chacun avait déjà, un jour ou l’autre, été obligé d’assister à une décapitation « publique ». On lui racontait, après, après qu’il ait entendu les préparatifs, la lecture de la sentence, les cris ou les pleurs du malheureux condamné. Et puis le glissement, le frottement du métal, jusqu’au CLAC ! final, brutal, définitif. On lui avait dépeint le jaillissement pourpre de la vie qui s’évadait.
Des fragrances de bougainvillées et de roses de porcelaine faisaient frémir les narines de Joseph, des ibis rouges passaient en formation au dessus de la prison mais il ne les voyait pas. En revanche il devinait le battement infiniment rapide des ailes du colibri, en suspension devant un hibiscus sauvage dont il tirait les sucs de son bec effilé.
Le tour de la cour a été effectué et Hassan a pris soin de passer au large de l’engin. Joseph lui en a été gré en lui serrant légèrement le bras au passage.
Joseph est retourné sur la paillasse de sa cellule. Il s’est allongé, le visage tourné vers la lumière qu’il devine à travers les barreaux du plafond. Il a pensé quelques minutes à sa fille, son trésor, son bijou, si loin là bas, en métropole. Qui ne saurait sans doute jamais rien. Qui serait sans doute dans le métro, demain à 6 heures, pour partir travailler. Travailler… Il s’est endormi.
C’est le froid qui le réveille. Les 20 ou 22° du petit matin, la rosée qui recouvre tout, y compris ses vêtements. Il devine la clarté du jour qui point. Il doit être pas loin de 6 heures.
Pourtant rien ne bouge. Même les bruits habituels de l’établissement sont absents. Pas de cavalcades à l’extérieur, pas de sons de vaisselle, aucun échange d’invectives ou d’ordres lancés par les gardiens, rien.
Joseph étire ses membres engourdis et se lève, pose sa main sur le battant de bois de la porte, comme tous les matins.
La porte ne résiste pas et s’ouvre… Vers l’extérieur…
Joseph connaît si bien les lieux qu’il s’enhardit à mettre un pied sur le quai qui surplombe la cour herbeuse. Il n’ose appeler. Son instinct d’aveugle lui affirme qu’il est seul. Il se met à longer le bâtiment, touchant de la main chaque porte de chaque cellule au passage, pour les compter. Se sachant parvenu à la grande grille d’entrée, il ose empoigner l’énorme loquet habituellement pourvu d’un cadenas impressionnant. La grille cède à son tour, pivotant sans peine et laissant le passage à un Joseph abasourdi.
Celui-ci, se fiant à son sens olfactif, trouve sans peine la porte qui jouxte celle des cuisines. Il sait que celle-là donne dehors. DEHORS ! Se pourrait-il ?… Il hésite. Et puis ? Pourquoi pas ? Au point où il en est ! La dernière porte s’ouvre, Joseph met un pied sur le seuil. Il ne se passe rien.
Il continue d’avancer, fait plusieurs pas, méfiant car cet environnement ne lui est plus familier.
Bien lui en prend car un coup de klaxon aigu le fait presque perdre l’équilibre tandis qu’un bruit de freinage lui prouve qu’une voiture vient de s’arrêter à sa hauteur.
- Eh bien grand-père ! Tu montes ? T’as une drôle de tête ! Allez, viens, on va se réchauffer l’estomac, monte donc !
Grand-père ? Joseph ne comprend rien, il montre ses yeux en secouant la main pour expliquer son handicap. L’homme rit, gêné, descend de son véhicule et installe Joseph à côté de lui. Il démarre en trombe et crie, en tentant de surmonter le bruit de sa mécanique :
- On dirait que tu sortais du bagne là, je me trompe ? Tu as squatté là dedans ? Tu n’as pas où dormir grand-père ?
- Euh, c’est-à-dire, parvient à articuler le pauvre Joseph, j’ai vraiment l’air d’un grand-père ? Et puis non, je n’ai pas où aller à vrai dire.
- Alors c’est tout trouvé grand-père ! Aujourd’hui c’est Noël, il ne sera pas dit que tu resteras seul ! Tu vas même te rendre utile : je t’emmène chez moi, tu enfileras ma tenue et tu feras le Père Noël à ma place pour les enfants de l’école, okay ?! Tiens, bois un coup va, t’as pas l’air dans ton assiette. Avec ça, tout ira mieux !
Et Joseph siffla la bouteille à lui tout seul en moins de 10 minutes comme s’il avait fait ça toute sa vie, pendant 28 ans, une bouteille par jour, tous les jours, sans sourciller…

(1) On appelait ainsi les anciens bagnards arabes ayant purgé leur peine, embauchés ensuite comme gardiens.
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Boom in London

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Yacinthe et Xavier avaient décidé de passer leur lune de miel en Europe.
On se souvient de l’orage mémorable qui égailla les invités le jour de leur mariage en Guadeloupe à la sortie de l’église de Goyave.
Le jeune couple était peu enclin à la morosité et plutôt réjoui de confirmer l’adage sur le bonheur attaché aux mariages pluvieux. Ils avaient donc traversé l’Atlantique pour affronter le climat humide de Londres pendant 2 semaines et se trouvaient alors sur la piste de danse d’une discothèque branchée de Picadilly.
La sono - assourdissante, comme il se doit - emplissait la cave londonienne aux murs violets qui servait de défouloir aux hurluberlus de tout poils s’y trémoussant à qui mieux mieux.
Yacinthe distinguait dans les flashes du stroboscope l’éclat des clous argentés qui parsemaient les vestes noires des jeunes aux allures de cockneys.
Xavier tentait de suivre le rythme endiablé d’une techno d’enfer, regrettant déjà les ondulations lascives des zouks collés-serrés qu’il dansait avec sa fiancée à Basseterre.
Le DJ enchaînait sans réel enthousiasme.
Pour tout dire, Xavier s’inquiétait plutôt des regards appuyés qu’un jeune passablement allumé jetait à Yacinthe depuis quelques minutes. Le garçon titubait plus qu’il ne dansait mais se rapprochait insensiblement de la jeune femme qui n’avait rien remarqué, semblait-il... Xavier amorça un mouvement pour former écran entre Yacinthe et l’autre lorsque l’éclairage et la sono s’arrêtèrent sans préavis.
Le silence fut si brutal qu’il parut assourdissant.
Xavier murmura, comme pour lui-même : « P... ! Noir c’est noir ! ».
Moins d’une seconde plus tard, ce fut la panique. Des hurlements de femmes, des bruits de meubles renversés, de bouteilles brisées jaillirent de tous côtés.
Yacinthe et Xavier hurlèrent aussi leurs prénoms respectifs. Le garçon tendit le bras dans la direction de la jeune femme, saisit une chevelure, prit un coup à l’estomac, lâcha prise, glissa, se retrouva au sol, à moitié piétiné par des gens affolés.
Quelques éclats de briquets lui permirent enfin de distinguer des ombres et il vit Yacinthe, les yeux écarquillés, à moins d’un mètre de lui, au sol également. Il rampa vers elle et agrippa sa jupe en se jurant de ne pas la lâcher.
Le désordre et la panique étaient indescriptibles dans le grand local. Aucune affichette lumineuse du genre « Exit » ne signalait la sortie de secours que Xavier avait pourtant repérée derrière le bar, à son arrivée sur les lieux. Le DJ avait déserté sa cabine, sans doute, micro devenu muet.
Xavier serrait maintenant Yacinthe de toutes ses forces et tentait de ramper pour s’approcher d’une cloison afin de ne plus se faire marcher sur le corps. Tout à coup il eut l’illumination ! Fouillant ses poches, sa main trouva le fétiche qui ne le quittait jamais depuis que son tuteur le lui avait offert 10 ans auparavant : un megasoma acteon, reproduction fidèle des énormes scarabées volants noirs qui hantent les forêts tropicales la nuit avec un bruit de bombardier. Celui-ci était un gadget qui lui avait déjà servi plus d’une fois dans des circonstances délicates. Cette fois encore il allait lui sauver la mise...
Un déclic et la bestiole métallique émit un puissant faisceau lumineux. La pile était encore bonne ! Les deux jeunes gens se redressèrent et, mètre après mètre, gagnèrent l’issue derrière le bar. Xavier actionna la barre de sécurité et le double-battant s’ouvrit aussitôt, libérant le couple.
La discothèque vomit alors dans la ruelle aux pavés luisants une foule hagarde et hurlante qui s’égailla sans demander son reste.
Yacinthe se jeta dans les bras de Xavier qui la couvrit de baisers et l’entraîna vers les lumières du boulevard qu’on apercevait là bas, tout au bout. Les lumières de la ville.
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Fête de la zic

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Je me rappelle ce jour, ce grand jour . Ce jour où j’ai épousé Yacinthe. Le jour où ma bien-aimée m’a dit « Oui Xavier ».
Comment ne pas m’en souvenir ? Le son cristallin du youkoulélé résonne encore dans mes oreilles.
J’aime cet instrument. J’ai toujours aimé cet instrument.
Je n’ai jamais été ni musicien ni mélomane. Mais ce son pur, cette cascade de notes rafraîchissantes me consolent de ces espèces de guimbardes, cornemuses et autres hélicons lancinants et monotones.
Non, vraiment je ne vois pas d’instrument qui vaille celui-là.
Je sais, je sais que mon avis est subjectif. Je veux bien admettre que mes origines font pencher la balance. Je n’essaie pas de faire partager à tous prix ma préférence. Je ne veux pas non plus imposer mon choix.
D’ailleurs Yacinthe est d’accord, je le vois. Je ne me rappelle pas qu’elle ait été une seule fois en désaccord avec moi sur rien. Je l’aime ma Yacinthe.
Et je ne sais pas si un quelconque banjo, un sublime harmonica, ou même une guitare à 12 cordes pourraient nous faire changer d’avis.
Je me demande même si nous arriverions à trouver le moindre aléa capable de séparer nos deux cœurs.
J’essaie de m’y forcer, mais non. Rien à faire.
Et s’il y a quelque chose que je déteste c’est bien qu’on tente de me prouver que j’ai tort, que nous avons tort.
Mais nos amis le savent : dans ce cas, c’est comme s’ils pissaient dans un violon…
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Pêche à Malendure

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Chouette ! Amédée m’a invité à une partie de pêche pour cet aprèm. J’adore ça la pêche. Oh, pas le truc où on se pose sur un pliant pendant cinq heures au bord d’un étang tranquille à attendre qu’un imbécile de têtard adulte attardé essaye de sauver l’asticot qui se noie au bout de la ligne, non. La pêche en mer, la vraie. Celle où ça bouge. Où les poissons ont leur chance. Et avec ce beau ciel bleu, ça va l’faire ! Qu’est-ce qu’il fait beau ! Je ne m’en lasserai jamais.
Je suis déjà sur le ponton du mini-port de Malendure, en face de l’îlet Pigeon. L’ami Amédée ne devrait plus tarder.
Bizarre qu’il m’ait donné rendez-vous ici, normalement la pêche est interdite dans le coin. Il y a une réserve aquatique naturelle sur 3 km de côte et au moins 1 km vers le large : la réserve Cousteau. Il y a des espèces rarissimes et splendides, paraît-il.
Mais Amédée doit savoir ce qu’il fait.
Là bas, ça y est, je reconnais son canot bleu.
Il accoste en douceur, saute sur les planches avec son éternel sourire éclatant, me tape dans le dos et me pousse dans l’embarcation sans ménagements.
Je le trouve bien exubérant. Encore plus que d’habitude.
On échange quelques plaisanteries puis je lui fais remarquer :
- Dis, elles sont où les lignes ? Et tes boîtes, ton attirail ?
- T’occupe, je t’ai préparé une surprise. Tais-toi, tu verras bien.
Bon, puisqu’il le prend comme ça.
Il a mis le cap vers l’îlet Pigeon en droite ligne. On dépasse quelques bateaux à fond de verre, pleins de touristes curieux.
L’eau est d’un bleu ! J’ai l’impression qu’en y plongeant la main, elle va en ressortir teintée !
C’est d’ailleurs ce que je fais parce que le soleil tape.
Amédée ralentit puis accoste son embarcation dans une petite anse cachée à l’arrière de l’îlet, face à la mer. On ne se croirait jamais à 500 mètres de Malendure !
Et c’est là que mon copain m’interpelle :
- Au fait Guy, t’as un maillot ?
- Un maillot ? On est venus pêcher non ?
- Ben non, en fait je vais te montrer les poissons, mais sous un angle que tu ne connais pas. Je sais que tu l’as jamais fait, mais on va plonger. Tiens, déshabille-toi et mets ce tuba. Je vais t’expliquer.
Tout en prononçant ces phrases, lui-même se retrouve nu comme un ver… Je sens que je frise le ridicule là. Le mieux est de jouer l’indifférence et rester naturel. Je fais donc pareil et il me dit juste de prendre une bonne respiration et de le suivre, de remonter respirer quand j’en ai envie, puis de redescendre.
Jamais fait ça moi ! Jamais osé ! Je ne me dégonfle pas et dès qu’il a sauté, je prends la suite.
Le silence s’établit après les dernières petites bulles sonores qui filent vers le haut, vers la lumière bleutée.
Nous avons changé de planète.
Je suis bon nageur, je ne connais pas de natifs qui ne le soient pas. C’est juste le souffle qu’il faut parvenir à réguler. Mais Amédée est expérimenté. Il m’entraîne vers les rochers les plus proches, guère plus de 1 mètre 50 de profondeur.
Déjà une myriade de poissons de toutes couleurs accourent à notre approche. Ils nous entourent, comme pour nous souhaiter la bienvenue.
Aucune répulsion à notre égard, au contraire, on dirait qu’ils sont attirés.
Finalement je comprends que c’est normal : nous sommes dans le volume de la réserve et jamais l’homme ne poursuit le poisson ici. D’où cette familiarité. Ca me fait tout drôle ça.
Nous sommes maintenant au beau milieu de centaines de spécimens dignes des plus riches aquariums du monde. Ma peau est chatouillée mille fois par les caresses de minuscules nageoires familières.
On croit parfois que la plongée sous-marine est un sport très individualiste. Pas du tout . En tout cas ici, aucun risque de ressentir la solitude !
Les adorables petites bestioles multicolores batifolent autour de nous avec une joie visible et mon Amédée a le sourire qui déborde du masque. Il va boire la tasse à rire comme ça !
Et moi je profite de l’instant. J’en oublie presque que mes branchies sont des bronches et qu’il leur faut leur dose d’air. Je file donc régulièrement vers le bleu lumineux du dessus et replonge aussitôt dans le bleu profond d’un monde tranquille.
Nous avons passé près de deux heures avec nos nouveaux amis.
Et Amédée a gagné son pari personnel : il a réussi à me persuader, sans dire un seul mot, que mon goût pour la pêche avait un côté barbare et gratuit que je devais abandonner. Mon écœurement à imaginer maintenant qu’on puisse attenter à l’existence de ces merveilles a atteint un point irréversible.
Et même si je reste assez pessimiste sur la pérennité de la protection de cette nature merveilleuse, je suis bien décidé à apporter dorénavant ma petite pierre à sa défense.
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Mariage à Gwada

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Yacinthe et Xavier se tiennent pas la main. Tous deux sourient largement à la petite foule qui les observe sur le parvis de la petite église de la petite localité de Goyave. Les cloches tintent joyeusement. La cérémonie vient de se terminer et le couple, uni devant Dieu, rit à la vie, au soleil, aux ibis rouges qui traversent le ciel, en formation, tout là haut.
Les amis, la famille, applaudissent en criant des compliments. Les appareils-photo crépitent. Les pétales d’hibiscus parsèment de rouge la robe immaculée de la mariée et le chemin de graviers qu’elle foule maintenant d’un pied décidé.
Xavier est aux anges. Depuis qu’il a connu Yacinthe sur le Caillou, là bas, à Nouméa, depuis qu’il a deviné en la jolie Guadeloupéenne la femme qu’il avait rêvé d’avoir à ses côtés toute sa vie, il n’a plus pensé qu’à la séduire. Sans se perdre en efforts inutiles, il n’a pas eu besoin de déployer des trésors d’ingéniosité car le cœur de Yacinthe lui avait très vite soufflé qu’elle avait là l’homme qu’elle attendait.
La jolie créole et le beau chabin s’embrassent en fermant les yeux sous les sifflets amicaux de l’assistance..
Un grondement. Le ciel, en quelques secondes, s’obscurcit à l’extrême. De grosses gouttes tièdes s’écrasent sur les capelines fleuries. Une rumeur enfle, des ombrelles s’ouvrent, quelques personnes commencent à courir vers un abri. Le clocher tintinnabule de plus belle.
Xavier et Yacinthe se regardent, rient, s’embrassent encore, se mettent à courir eux aussi.
La saison des pluies parvient toujours à surprendre les plus aguerris. Ici, le ciel le plus bleu peut se transformer en trois minutes en une réserve d’eau tiède inépuisable ! Un rideau de pluie intense ne permet plus de voir à cinq mètres ! Peut-on être à ce point inconséquent : oublier les parapluies !
Les deux amoureux se réfugient in extremis sous un toit de bambous serrés, mais ils sont mouillés comme une soupe de lambis. Ils se regardent, rient encore, s’enlacent, s’essorent, se serrent, se resserrent. C’est le bonheur total.
Ce n’est pas subrepticement que le climat de Guadeloupe aura confirmé le dicton « mariage pluvieux, etc... ».
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Les Saintes

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Le vieil autobus brinqueballait depuis le village de Bouillante. C’était encore une de ces reliques des premiers âges de l’automobile. Un antique « Chausson » rafistolé, rongé de rouille, peint et repeint des centaines de fois. Il crachait une fumée noirâtre et il était surmonté d’une galerie surchargée de valises et autres caisses à claire-voie d’où sortaient des ailes de poules ou des queues d’animaux indéterminés. Bestioles bien vivantes si l’on en jugeait par les cris et piaillements divers qui accompagnaient le rythme joyeux des pistons en folie.
- J’ai le mal de mer… ça va pas du tout… je voudrais descendre…
L’oncle Bob entoura les épaules de sa nièce de son bras droit pour la réconforter :
- Allez, Choupinette, plus qu’une petite heure avant Trois-Rivières. Tu tiendras ? Tu as l’habitude portant !
- Tu parles ! Blurp ! Et après on prend le bateau pour les Saintes ! Blurp ! Non mais tu veux ma mort tonton Bob ! pleurnichait ladite Choupinette en tenant son mouchoir devant sa bouche.
- Tu sais bien que c’était indispensable, Bibichounette. Un jour ou l’autre il aurait fallu que tu le fasses ce trajet. Et puis quoi ! Après tout c’est toi qui le demandes depuis des années ! Non ? Pratiquement depuis que tu as 5 ou 6 ans ! Et tu en as 30, non ? Alors ! Il était temps que tu franchisses le pas.
- Je sais, blurp ! Oooooohh !…… Blurp !…
Tout juste le temps de se lever et de se jeter vers la fenêtre baissée du côté droit. La jeune femme se libéra enfin au milieu des éclats de rire des passagers les plus proches qui n’attendaient que ce signal pour s’en donner à cœur joie !
- Mademoiselle, vous avez filé votre bas je crois, lança un vieux à la peau aussi noire et ridée que ses cheveux étaient blancs et crépus.
- Merci, blurp, répondit la nièce en reprenant sa place auprès de tonton Bob.
En réalité l’heure passa plus vite que prévu. Le drôle de couple alla s’inscrire et s’embarquer pour la navette qui partait 10 minutes plus tard. Les îles étaient bien visibles entre les deux bleus distincts de la mer et du ciel.
Les 12 km de trajet furent vite avalés. Le temps était si calme que la jeune femme ne ressentit plus de nausée et débarqua sur la terre ferme en pleine possession de ses moyens. Elle se surprit même à esquisser une petite pirouette en se dirigeant avec l’oncle Bob vers l’échoppe de location de scooters devant laquelle attendait déjà une dizaine de clients.
Ici c’est le moyen de locomotion idéal, pour les habitants eux-mêmes comme pour les touristes d’un jour tant les routes sont étroites ou encaissées, ou les deux ensemble !
L’engin démarra et oncle Bob se dirigea sans hésiter vers la grande bâtisse de style colonial qu’ils avaient déjà repérée depuis le port et qui abritait tous les services administratifs de l’île.
- Ca va ma Clopinette ? Pas trop de vent derrière ?
- Tout va bien, mais c’est pas loin. Je brûle d’impatience.
- Moi je brûle de chaleur tout court ouais ! On était mieux sur le bateau !
- Qu’est-ce que tu es grincheux ! Allez, gare-toi là, tu as vu l’écriteau : « Archives ». C’est là !
Quelques portes, quelques escaliers, des ventilateurs tournant lentement dans des couloirs surchauffés malgré les ouvertures sans fenêtres aux simples volets à claire-voie. Un bureau : « Service de recherches généalogiques ».
L’oncle toque et entre sans attendre de réponse.
Une grosse dame en sueur s’évente derrière un long comptoir blanc, affalée dans un fauteuil haut à bascule.
- Bonjour madame, risque Bob.
- Bonjour. Attendez s’il vous plaît, 9 minutes, j’ai ma pause.
- Euh… d’accord, mais… il n’y a personne d’autre ?
- Attendez, s’il vous plaît !
L’oncle Bob a l’habitude et ne se formalise pas. Mais la Choupinette-Bibichounette-Clopinette ne l’entend pas de cette oreille. L’éducation en métropole n’apprend pas aux gens à prendre la vie comme elle vient, à laisser du temps au temps, à profiter de l’instant qui passe… Elle trépigne.
Le tonton la retient, lui fait comprendre discrètement qu’il ne sert à rien, ici, aux Antilles, de bousculer l’ordre des choses. Il n’y a rien à y gagner. Au contraire.
- Votre nom s’il vous plaît ? C’est pour quelle demande ? s’enquiert enfin la grosse employée toujours aussi dégoulinante de sueur malgré le brasseur d’air au plafond.
- Nous avons écrit il y a 2 mois pour établir une ascendance pour ma nièce en ligne directe. Mademoiselle Plouhinec. On nous a informés par mail que les résultats étaient disponibles. Comme nous sommes en vacances au Gosier, on en profite pour passer.
- Le prénom s’il vous plaît ?
- Bécassine.
- Oui. Je vois, je vais vous chercher ça s’il vous plaît. Vous aviez demandé à remonter assez loin n’est-ce pas ?
- Au maximum oui.
- Voilà. Tout est là. On vous enverra la facture à domicile. Au revoir s’il vous plaît.
L’oncle remercie et le couple quitte la pièce, muni des précieux documents.
Bécassine Plouhinec n’y tient plus. Elle arrache des mains de Bob les feuillets qu’il consultait déjà et les dévore fébrilement.
- Youhouhouhouh !!! Youpiiiiiiiiiiiiiii !!! Je le savais !!! Regarde tonton ! Regarde !
- Quoi donc ma bombinette ?
- Mais je suis bretonne !!
- Eh, c’est pas un scoop ! Avec ce nom là !
- Oui, mais je suis bretonne par mon père et antillaise par ma mère ! Tu comprends ? Je ne les ai pas connus, et toi tu n’es pas mon vrai oncle, mais avec les papiers qu’on a retrouvés à l’époque de leur disparition, eh ben tu vois : mon père descendait de plusieurs générations de Bretons. Parce que apparemment la grande majorité de la population des Saintes descend de marins bretons ! Oh, je suis contente, contente, contente !
- Tant mieux, et en fait, pourquoi si contente ?
- Depuis le temps ! Tu te rends pas compte tonton ! T’as pas remarqué dans les rues tout à l’heure ? Je vais enfin pouvoir expliquer pourquoi je suis noire avec des cheveux crépus roux ! Géniaaaaaal !
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Quand je serai grand

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Quand je serai grand, moi je voudrais être guide.
Oh, pas guide de haute montagne, là où ça caille à moins 30° quand on est à 2000 (mètres). Là où on s’entend pas, rien qu’à cause du blizzard.
Pas guide dans un musée non plus. Là où il fait plus + 30° quand on est à 2000 (personnes). Là où on s’entend pas, rien qu’à cause du monde.
Non, je voudrais être guide sur mon île.
Mais un guide spécial.
Un guide qui choisit ses clients.
Un guide qui parle un peu, fait parler beaucoup, qui aime et fait aimer.
Pas un moulin à parole monocorde qui attend que cinq heures arrivent pour compter les piécettes de bonus.
Je saurai faire admirer la cascade aux écrevisses, mais pas juste l’instant d’une photo. Le temps aussi d’enfiler un maillot pour glisser derrière le voile de brume qui cache de si beaux rochers capitonnés de mousse verte et mauve.
Les plus aguerris me suivront jusqu’à la première des trois Chutes du Carbet, là haut, sous 110 mètres de dénivelés d’un seul jet tiède et soufré.
On glissera doucement entre les Mamelles qui délimitent à ravir le versant montagneux de Basse-Terre d’avec la descente vers l’Anse Colas et Pointe-Noire.
Chacun comprendra pourquoi le sable de la plage de Malendure est noir de jais. Pourquoi l’îlet Pigeon est peuplé de « grands gousiers ». Où, quand et comment Colomb a débarqué, croyant découvrir les Indes, avant de pousser plus loin, aux Amériques. On saura les traces laissées par les Arawaks sur les Roches Gravées de Trois-Rivières. Je dirai l’histoire de la canne, des esclaves qui l’ont travaillée, des « habitations », toutes ruinées aujourd’hui. J’expliquerai la genèse du rhum du Père Labbat, le pourquoi de ces bananeraies splendides.
Je taillerai dans une branche de bois-caca pour faire « ressentir » la différence avec un bois-bandé ou un simple wacapou.
Je montrerai le figuier-étrangleur qui vit aux dépends de celui qui a le malheur de l’héberger.
A cinq heures le matin, en parlant de la canopée, je désignerai là bas l’envol d’ibis rouges au levant.
Sur la crique Moustique je ferai voir les morphos bleus et les planeurs grands comme la main qui virevoltent au gré des alizés.
Et l’on se contentera d’imaginer ce qui ne se dévoile qu’à la nuit tombée : crapauds-buffles au beuglement profond, jaguar au feulement doux, singes rouges au goitre hyper-développé et cigales électriques au sifflement strident.
Les nuits en hamac dans la forêt seront nos étapes 1000 étoiles sans supplément.
Nos pas nous mèneront vers le trou de madame Coco, celui du souffleur et jusqu’à la Porte d’Enfer, au pied de ces immenses falaises verticales qui tombent dans une eau bleu de méthylène.La Pointe des Châteaux aux fausses allures de Pointe du Raz balayée de vents du nord permettra une dernière vision grandiose des contrées traversées, et une baignade à Sainte-Anne caressera des peaux déjà cuivrées avant de devoir penser au retour vers un quotidien tout autre.
Oui, je serai guide sur mon île, je n’en doute pas.
Un jour.
Demain.
Aujourd’hui. La preuve…
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02 septembre 2006

Le petit au lambi

Les yeux fermés, fossettes aux joues,
Petit garçon, écoute la mer.
As-tu pensé, cher petit bout,
Suivre le son jusqu’à Basse-Terre ?
Quel capitaine sur son voilier
Un jour criera « viens matelot » ?
Tu es en peine car tu le sais,
Jusqu’à Gwada, y en a de l’eau !
Un jour viendra où ton lambi
Murmurera à ton oreille.
Il soufflera le vent ami
Qui te dira mille merveilles.
Garde patience petit enfant,
Ton rêve sera, si tu es sage.
Crois, vis, ris, danse. Si tu comprends,
Il te prendra, le vent du large.
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Ilet

Bananes

Allée du Manoir

Figuier étrangleur

Marché de PàP

Morne-à-l'eau (cimetière)

Anse

Arbres du voyageur

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